"L'alsacien, c'est peut-être de l'allemand, mais de l'allemand déformé."

Faux. Parmi les idées fausses sur les langues, voilà l'une des plus répandues et des plus tenaces. Les parlers locaux seraient des avatars "déformés", mauvais, de la "vraie langue", la langue officielle.

La réalité est toute différente. Nos parlers locaux existent (et évoluent) depuis des siècles. La langue officielle correspondante - pour l'alsacien, c'est l'allemand standard - s'est cristallisée assez tardivement. En France, c'est le pouvoir central qui a imposé son parler parisien. Dans les pays de langue allemande, dont nous sommes, c'est l'influence d'une publication particulière - la Bible allemande de Luther - qui a donné à l'une des formes de la langue un prestige plus grand que les autres et l'a imposé comme forme écrite officielle.

Les parlers locaux ont continué à avoir cours plus ou moins. Les dialectes suisses restent très vivants, alors que les dialectes bas-allemands (région de Hanovre) sont moribonds comme les "patois" français.

Pour nous, il n'y a pas à jouer l'allemand standard contre le dialecte, ni le dialecte contre l'allemand standard, mais à nous appuyer sur l'allemand standard pour mieux conserver le dialecte, sur le dialecte pour apprendre plus facilement l'allemand standard : user du dialecte à l'oral, de l'allemand standard à l'écrit. Sans cet appui, le dialecte est perdu.